La dénutrition dans la cicatrisation
Le processus de cicatrisation entraîne un hypercatabolisme et une déperdition protéique au niveau de l’exsudat qui augmentent fortement les besoins de l’organisme, notamment en protéines. L’intensité du processus est de plus proportionnelle à la sévérité de la lésion.
Les patients porteurs de plaies chroniques présentent un risque de dénutrition plus élevé car elles aggravent le statut nutritionnel.
Plusieurs études menées chez des patients dénutris ayant subi une amputation, montrent : « Une morbidité postopératoire plus importante, des retards de cicatrisation, des surinfections plus fréquentes que chez les patients non dénutris. La dénutrition favorise le lâchage des sutures. La malnutrition aiguë ou chronique antérieure au traumatisme ralentit la cicatrisation. » Gérard Mann, nutritionniste, service de nutrition clinique, centre médical de Forcilles, 2006.
La dénutrition et la perte pondérale sont des facteurs inducteurs de l’escarre qui s’accompagnent d’une fuite protéique et d’un hypercatabolisme qui aggrave la dénutrition, et celle-ci doit être systématiquement recherchée.
Si l’état de dénutrition se prolonge, au bout de quelques semaines, la plaie perd sa priorité biologique par rapport au métabolisme général de l’organisme.
Le dépistage de la dénutrition selon les recommandations de la HAS (2019 et 2021)
Critères phénotypiques : 1 seul suffit
Perte de poids
≥ 5 % en 1 mois ou
≥ 10 % en 6 mois ou
≥ 10 % par rapport au poids habituel avant le début de la maladie.
IMC < 18,5 kg / m2 et < 22 kg / m2 pour les personnes âgées de plus de 70 ans.
IMC < 17 kg / m2 pour les adultes.
Réduction quantifiée de la masse et/ou de la fonction musculaire ou sarcopénie confirmée pour les personnes âgées.
Critères étiologiques : 1 seul suffit
Réduction de la prise alimentaire
≥ 50 % pendant plus d’1 semaine, ou toute réduction des apports pendant plus de 2 semaines par rapport :
– à la consommation alimentaire habituelle quantifiée.
– ou aux besoins protéino-énergétiques estimés.
Absorption réduite (malabsorption / maldigestion).
Situation d’agression (hypercatabolisme protéique avec ou sans syndrome inflammatoire).
Les besoins nutritionnels pour les patients dénutris en situation de cicatrisation.
Les besoins nutritionnels lors de la cicatrisation sont accrus et il faut majorer les apports en protéines, glucides et lipides et veiller à un apport recommandé en vitamines et oligo-éléments.
Les apports recommandés sont de 30-35 kcal / kg / jr et 1,2 à 1,5g de protéines / kg / jr.
Les nutriments : protéines, glucides et lipides
L’apport de protéines ralentit l’hypercatabolisme, compense les pertes azotées, favorise la régénération tissulaire et améliore les fonctions immunitaires.
Les glucides sont une source énergétique pour la réponse inflammatoire. En cas d’apports insuffisants, l’organisme puise dans les réserves protidiques et les protéines ne servent plus à la synthèse de collagène et sont déviées vers la production de glucose afin de lutter contre la dénutrition.
Les lipides sont aussi utilisés comme substrats énergétiques avec les glucides pour éviter un catabolisme protéique. Un déficit d’apport en acides gras poly-insaturés (acide linoléique) perturbe la formation des membranes cellulaires, retarde la cicatrisation, augmente l’inflammation, altère la qualité de la peau (peau sèche, desquamation fine, dermite séborrhéique).
Les vitamines et les oligoéléments
La survenue d’une infection est un risque majeur lors de la cicatrisation.
La vitamine C stimule les mécanismes de défense immunitaire et joue un rôle fondamental dans la fabrication du collagène.
La vitamine A est un antioxydant qui facilite l’afflux de monocytes et de macrophages au niveau de la plaie.
Le zinc aide à renforcer le système immunitaire et active la cicatrisation des plaies.
Le fer, en luttant contre l’anémie qui rallonge les délais de cicatrisation, accélère la réparation des plaies.
Le cuivre a un bon potentiel dans les processus de cicatrisation.
Sans oublier l’hydratation !
Les apports hydriques sont également primordiaux avec un besoin de 35ml / kg / jr, dont 1 litre est apporté par l’alimentation.
Si l’alimentation ne permet pas de couvrir les besoins nutritionnels et qu’une perte de poids est constatée le médecin traitant ou hospitalier pourra prescrire des compléments nutritionnels oraux. Ces compléments nutritionnels sont enrichis en arginine, en vitamine C, en vitamine A, en zinc, en sélénium et en cuivre. Ils sont recommandés chez les patients porteurs d’escarre aux stades III-IV, ou résistantes aux traitements usuels, ou en cas de plaies étendues consécutives à une brûlure.
Une assistance nutritionnelle par perfusion peut être envisagée en cas d’échec de la complémentation orale.
Pour assurer une cicatrisation optimale il est donc indispensable de considérer le patient dans sa globalité et le regard porté sur son état nutritionnel est essentiel tout au long de la prise en charge.
Webinar
Vidéo webinar sur la cicatrisation et la dénutrition.
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